La main gauche de la nuit / Ursula K. Le Guin

La main gauche de la nuit / Ursula K. Le Guin

couverture du roman La main gauche de la nuit de Ursula K. Le Guin

Sur Gethen, planète glacée, il n’y a ni hommes ni femmes, seulement des êtres humains. Des hermaphrodites qui, dans certaines circonstances, adoptent les caractères de l’un ou l’autre sexe.
Genly Aï, un ambassadeur venu de la Terre, est chargé de rallier Gethen aux autres planètes déjà réunies sous les couleurs de l’Ekumen. Mais mille obstacles se dressent devant lui. La tâche sera rude. Parviendra-t-il à mener à bien sa mission ?

Avis : Cette édition de La main gauche de la nuit a bénéficié d’un gros travail éditorial, avec pré et postface, et d’une magnifique couverture reliée qui en fait un bel objet en plus de lier l’évasion à la réflexion.

Genly Aï est l’émissaire envoyé sur Gethen (Nivôse en langue Ekumen), une planète glacée très inhospitalière. Kharkaïde et Orgoreyn, y sont deux pays dont les peuples sont en froid. Kharkaïde est plutôt une monarchie, quand Orgoreyn fait penser à l’URSS… L’Ekumen est un groupement de 123 planètes dont le but est d’apporter communication et commerce. Gethen est leur dernière planète en vue de rapprochement. Mais Genly Aï doit d’abord parvenir à les convaincre de se joindre à l’Ekumen par la raison et non par la menace ou la peur… il commence par la Kharkaïde et son roi Argaven ainsi que l’oreille du roi, Estraven. Auquel il ne fait pas confiance. Ce qui va l’entraîner dans une galère monstre. Prison, ferme volontaire et centre de réadaptation, fuite aux travers un monde de glaciers et de volcans… mais Aï va aussi toucher du doigt ce qu’est le fameux Shifgrethor (sorte d’ego) de Kharkaïde et en apprendre beaucoup de ces humains non sexué (sauf lors de la période qu’ils nomment kemma) et hermaphrodite.

Ainsi Ursula K. Le Guin touche à l’essentiel de la SF : proposer un dépaysement total, mais qui n’empêche pas la réflexion sur la/les « sociétés ».

Aï est un terrien noir, mais on ne l’apprend qu’au 3eme chapitre. C’est un homme qui est vu sur la planète Gethen comme « anormal » car toujours avec ses attributs sexuels masculins alors que les humains de Gethen sont asexués la plupart du temps. Enfin, il a des croyances qu’ils n’ont pas et inversement. Ainsi les attributions émotionnelles et une certaine mollesse aux femmes et la force aux hommes.

Un homme veut mettre en valeur sa virilité, une femme sa féminité, si indirect et subtil puisse être l’hommage qui leur est rendu. Sur Nivôse (Gethen), pareil hommage n’existe pas. C’est uniquement comme un être humain qu’on y est respecté et jugé – une expérience pour le moins bouleversante

Ça donne le ton de ce livre grandiose en théorie du genre, injustice sociale et raciale mais La main gauche de la nuit ne peut se réduire au travail anthropologique de son autrice. Il est aussi plein de suspense, de beauté descriptive et de mysticisme.

Ainsi le passage de la fuite d’Orgoreyn vers la Kharkaïde au travers un monde désertique de glace, neige et rocs. Avec des ombres ou des jours blancs, qui obligent Aï et Estraven à rester sous leur tente et nous, à nous demander s’ils vont y arriver. Mais la partie avec des Handdarata, des religieux sans religion et maîtres de la divination est aussi très enrichissante et tellement loin de notre société consumériste. Leur but est de « révéler la parfaite inutilité de connaître la réponse à la mauvaise question ».

Enfin, après toutes les péripéties et les complots , Gethen va-t-elle faire partie de l’Ekumen ? Pas de spoiler de ma part, il vous faudra lire La main gauche de la nuit pour le savoir.

Alors tout comme Les dépossédés de la même autrice et du même cycle de l’Ekumen, et que j’avais adoré, je vous recommande chaudement ce livre de Ursula K. Le Guin et vous laisse avec cette phrase choc en bonus :

Le mystère est le meilleur artisan du merveilleux

La main gauche de la nuit d’Ursula K. Le Guin est un roman publié aux éditions Robert Laffont (Ailleurs & delmain) – Traduit de l’anglais (États-Unis) par Jean Bailhache, traduction révisée par Sébastien Guillot, préface de Catherine Dufour, postface de Stéphanie Nicot

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