Pour les uns, l’autoroute symbolise la liberté, la fuite vers le soleil, pour les autres, les bouchons, la puanteur, le retour vers le travail-prison. Pour le poète, l’autoroute, vue d’en haut, ressemble à quelque gigantesque lézard posé sur la carte de France. La bête est parcourue de manière incessante par une multitude d’insectes qui s’affairent sur sa peau grise. Mais il arrive que le lézard, saisi de quelque prurit, se débarrasse d’un de ces insectes, d’un invisible mouvement d’écailles. L’insecte désemparé entraîne dans la mort plusieurs de ses congénères… Dans ce jour de juillet, des milliers d’entre eux sont disséminés sur l’ensemble du réseau routier. Et beaucoup mourront, en offrande aux dieux indifférents. L’autoroute est un autel. Un grand thriller-catastrophe signé Michel Lebrun.
Avis : Après A côté de la plaque de Marc Behm, chez le même éditeur Rivages/noir, voici Autoroute de Michel Lebrun. Un autre roman noir qui n’a pris que de petites rides quant au sujet de la sexualité de la femme. Ou plutôt de l’homme vis-à-vis d’elle…
Sur cette Autoroute tout est truculent, le trait y est un peu gros et pourtant la mayonnaise prend. Car le propos sociétal affleure de tous côtés : droit des femmes, sexualité, justice sociale, malbouffe, pollution des voitures et du macadam autoroutier, juste prix, politique…
En effet, on suit au volant de leur voiture (plus ou moins respective, il y a des rencontres et changements foutraques parfois…) et évidemment la plupart du temps sur l’Autoroute A 7 :- Bastide : chef de son restaurant qui vient de perdre son étoile du guide Michelin,
– Judith, (dite Rosa la rose pour noyer le poisson en cas d’espionnage), qui veut du mal à l’Autoroute avec son groupe extrémiste formé du Prophète, du Disciple et d’autres…
– Hugo, un flambeur qui entretient Cécile (dite Stella parce que ça fait plus chic) depuis 1 semaine…
– Philippe, un réalisateur sur le retour, avec Helena, sa scénariste.
Mais on va croiser énormément d’autres personnages, tous plus truculents, ou avec un pet’ au casque, les uns que les autres. Des voleurs, un chauffeur, un routier qui tient absolument à se faire faire des gâteries par tous ses autostoppeurs, une femme-enfant, des travailleurs de l’ombre (dame-pipi, pompiste, meneur de marteau piqueur), la femme du prophète, la maîtresse du réalisateur, un chaton noir (portera-t-il chance à ses nouveaux maîtres ?), un représentant en antivol… Liste non exhaustive.
Et surtout on va avoir un énorme suspense sur plusieurs des affaires : le restaurateur va-t-il se faire enlever le permis car il est soûl ? Ceux qui veulent faire péter l’autoroute vont-ils y parvenir? La malbouffe étouffera-t-elle quelqu’un ? Les voleurs vont-ils échapper à leurs poursuivants ? Hugo est il bien qui il prêtant être ? Bref, il y a plusieurs niveaux de lecture et c’est superbement drôle, plein de suspense ET profond.
Car il est aussi des passages poétiques sur l’autoroute et les gens qui l’empruntent.
Autoroute ne sera peut être pas sélectionné dans les 11 romans que propose les éditions rivages/noir sous le nom « les Iconiques de François Guérif » mais il m’a beaucoup plu et mérite le détour.
A suivre… peut être avec le livre La bête contre les murs d’Edward Bunker dans la même édition qui me fait de l’œil ! Ou bien l’Inuite de Mo Malø aux éditions La Martinière qui n’a rien à voir !
Autoroute est un roman publié aux éditions Rivages (Noir)