Année 2454. Trois siècles après des évènements meurtriers ayant remodelé la société, les concepts d’État-nation et de religion organisée ont disparu. Dix milliards d’êtres humains se répartissent ainsi par affinités, au sein de sept Ruches aux ambitions distinctes. Paix, loisirs, prospérité et abondance définissent ce XXVe siècle radieux aux atours d’utopie. Qui repose toutefois sur un équilibre fragile. Et Mycroft Canner le sait mieux que personne… Coupable de crimes atroces, condamné à une servitude perpétuelle mais confident des puissants, il lui faut enquêter sur le vol d’un document crucial : la liste des dix principaux influenceurs mondiaux, dont la publication annuelle ajuste les rapports de force entre les Ruches. Surtout, Mycroft protège un secret propre à tout ébranler : un garçonnet aux pouvoirs uniques, quasi divins. Or, dans un monde ayant banni l’idée même de Dieu, comment accepter la survenue d’un miracle ?
Avis : Mais comment résumer un 1er tome aussi foisonnant ?
C’est une utopie car en 2454, 7 ruches s’occupent de notre Terre en bonne intelligence. Ons choisissent leur ruche. (Pas de genre dans ce monde là, « on » au singulier et « ons » au pluriel suffisent !). Pas de religion mais un sorte de théologie où on philosophe avec son sensayer. Pas de famille au sens où on l’entend en 2024 mais des Bash. On peut changer de Bash, en créer de nouveaux, y être adopté …
Tout ceci avec une technologie incroyable :
- des « voitures » volantes extrêmement rapides.
- c’est la fin de la faim.
- plus de prison mais on devient servant pour racheter sa faute.
Il faut savoir que ce roman est en fait, un compte rendu fait par Mycroft Canner sur des événements qui ont bouleversé ce monde. Il se peut qu’ « on » se joue de nous… Mycroft Canner est un servant perpétuel qui a l’oreille des puissants et est leur confident. Et qui a en charge le secret le mieux gardé de tout les temps : Bridger, un jeune garcon qui peut animer des choses inanimées ou ressusciter un mort. Rien que ça ! On croise beaucoup (trop ?) d’autres personnages : des soldats de plastique devenus réels, un espèce d’inquisiteur, tous les dirigeants de tous les bash, ruches et autres groupes, une « madame Claude » , des journalistes, policiers, des AnimU (mi animal génétiquement modifié mi machine), l’enfant de l’empereur des statisticiens, des êtres couplés à des ordinateurs… Et j’en passe… Tous ont des rôles, des bash, des Interactions qui sont complexes, et tellement intriquées que ça ne facilite pas la lecture. Il faut vraiment être bien concentré et attentif au moindre détail.
La trame de cette histoire est un complot qui mettrait à mal toute la structure même de cette belle utopie. Tout en gardant en tête que la découverte par ce monde sans religion de Bridger, serait une catastrophe car il deviendrait un dieu. Après ce difficile résumé, entrons dans le vif du sujet ou plutôt des sujets qui sous-tendent ce roman. Il y a l’utopie d’avoir un monde le plus égalitaire possible et surtout sans guerre. Les différents portent sur comment maintenir le statut quo. Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de tension et que des luttes de pouvoirs ne sont pas en jeu. C’est d’ailleurs toute une partie du travail de Mycroft que de veiller à l’évolution de chacun des bash. Il y a cette différence notable avec notre présent, le fait qu’il n’y ait pas de religion. Ce sont les sensayers qui philosophent, qui « théologisent » et qui finement psychanalysent les individus. Et c’est assez incroyable à lire mais tellement complexe à expliquer.
Et enfin, il a ce double thriller mené de main de maître et qui infuse une tension incroyable. En effet, Mycroft Canner a commis de horreurs dans le passé et l’autrice nous en révèle progressivement de plus en plus. Ce n’est pas pour les coeurs sensibles. Dexter et même Hannibal Lecter peuvent aller se rhabiller ! Cette partie du thriller prend sa source dans le passé mais elle a des rebondissements bien actuels à partir du dernier tiers du livre. L’autre partie du thriller consiste à chercher les raisons et le/les instigateurs qui ont dévoilé une fausse liste des 10 personnes les plus influentes, ce qui fait vaciller les rapports de force et risque de mettre à mal le statut quo. Et Mycroft est bien sûr également au centre de suspense là. Mais c’est sans nul doute, l’existence même de Bridger qui questionne les fondations de ce monde et apportera encore plus de suspense dans le deuxième tome.
J’ai essayé de vous parler simplement de ce roman qui mêle utopie, fantastique, philosophie et jeu politique et qui réussit l’exploit d’élever le tout à un niveau stratosphérique. Un excellent choix de lecture si on est bien connecté à ces neurones. Si la rentrée pèse encore sur votre charge mentale, attendez un peu. Pour ma part, j’ai hâte de savoir : si, où, quand, comment et pourquoi le complot éclatera et quels rôles auront joué Mycroft et Bridger…
Roman publié aux éditions Le Bélial’- Traduit de l’anglais (Etats unis) par Michelle Charier.