À l’époque du commerce triangulaire, quand une esclave tombait enceinte sur un vaisseau négrier, elle était jetée à la mer. Mais toutes ces femmes ne sont pas mortes, et certaines ont même donné naissance à leur bébé. Celles qui ont survécu se sont adaptées à leur environnement et ont fondé une humanité parallèle au fond des océans. Depuis, les sirènes ont oublié l’histoire traumatique de leur genèse. Mais un jour, l’une d’elles, Yetu, va leur rendre la mémoire…
Avis : Quel étrange roman que voilà ! En fait, Les abysses n’est pas vraiment un roman, c’est plutôt un conte philosophique, ou même, l’histoire d’un mythe. Celui d’un peuple qui a muté pour survivre alors qu’on voulait l’annihiler.
Au commencement, 2 chansons : une première version par le groupe Drexciya, qui imaginait que les fœtus à naître des esclaves enceintes jetées par-dessus bord des navires négriers pourraient survivre dans l’océan ; et une seconde, par le groupe Clipping qui développait cette idée. C’est de cet univers que s’est inspirée Rivers Solomon pour créer Les abysses. Pour créer le peuple des Wajinrus et développer le devoir de Mémoire, si important dans leur communauté, mais vécu comme un poids tel, qu’une seule personne doit le porter.
Le récit suit Yetu, l’historienne de son peuple, qui se débat sous un fardeau qui la tue à petit feu. En parallèle, nous revenons sur la création de cette société sous-marine utopique. Le style est très narratif, avec peu de dialogues, et beaucoup de personnages qui ne font que passer ; et il est difficile de s’attacher à ceux qui sont plus développés. Pour cela, Les abysses est clairement un titre qui ne plaira pas à tout le monde.
Son but premier est plutôt de développer des thèmes et des réflexions que de divertir le lecteur. Rivers Solomon s’intéresse à la transmission et au sentiment d’appartenance, à l’identité collective et individuelle. Le passé et le devoir de mémoire, jouent ici un rôle très important, central même, car c’est lui qui nous définit. C’est lui qui influence nos choix, et la personne que nous devenons. L’auteur met en avant l’importance de le conserver mais aussi de le partager, afin de l’accepter.
Roman publié aux éditions J’ai lu – Traduit de l’anglais (États-Unis) par Francis Guévremont
Lire aussi l’avis de Tigger Lilly et de Yuyine