L’accès libre à l’eau n’est plus qu’un souvenir pour les millions d’Américains qui vivent dans le sud des États-Unis. Le fleuve Colorado est devenu l’enjeu d’une guerre sans merci entre les États qui le bordent. Certains sont prêts à commettre les pires exactions pour s’assurer le contrôle de l’or bleu. Angel est un water knife, un mercenaire qui mène des opérations musclées pour le compte du service des eaux de Las Vegas. Lors d’une mission à Phoenix où courent les rumeurs d’une nouvelle source, son chemin croise celui de Lucy, une journaliste dont les révélations sont à même de faire vaciller l’équilibre des forces en présence…
Avis : De Paolo Bacigalupi, j’avais déjà lu La fille automate, un récit d’anticipation désespéré d’une richesse peu commune. Et j’avais très envie de réitérer l’expérience, notamment avec Water knife qui me faisait de l’œil depuis sa sortie en grand format. Je n’ai donc pas hésité à sauter dessus à sa sortie en poche, et je ne le regrette pas du tout, car j’ai adoré ce roman fort et intelligent !
Les États ne se déclarent plus la guerre pour le contrôle du pétrole, des frontières, de l’espace ou de l’énergie atomique, mais pour la ressource la plus précieuse entre toutes : l’or bleu, l’eau, cet élément indispensable à la survie de l’homme. Les États-Unis sont désormais divisés en cités-états et contrôlés par la poigne de fer de leurs Services des Eaux respectifs. Tandis que des villes entières se meurent, d’autres, mieux placées ou plus fortes, construisent des arcologies, des oasis autonomes fonctionnant en circuit fermé et profitant de leur propre écosystème. Des oasis réservés à une minorité.
Angel Velasquez est un water knife. Il travaille pour la reine du sud, Catherine Case, et va là où celle-ci l’envoie afin de maintenir sa mainmise sur l’eau au sud du fleuve Colorado. Expulser les gens, faire sauter des installations, ou mener une enquête et espionner font partie de ses larges attributions. Sa nouvelle mission l’envoie à Phoenix, ville en train de mourir mais qui semble s’être brusquement transformée en véritable panier de crabes. Il y rencontre Lucy Monroe, une journaliste qui mène sa propre enquête sur le meurtre de l’un de ses amis. Ils vont rapidement se rendre compte que la soudaine agitation de la ville, et plusieurs morts brutales sont liées.
Water knife réunit 2 de mes genres préférés, le thriller et l’anticipation, et il le fait extrêmement bien. Même si certains pourrons sans doute regretter la mise en place un peu longue de l’intrigue, cela ne m’a personnellement pas dérangée. Véritable page turner, le roman nous emporte sans temps mort dans un avenir affreusement réaliste, un avenir où il est temps de payer la facture et d’assumer les conséquences du réchauffement climatique.
De l’individu lambda aux grosses multinationales en passant par les organisations humanitaires, tous en prenne pour leur grade. À situation extrême, réaction extrême et il ne fait pas bon vivre dans cette société en plein déclin, où du jour au lendemain son voisin peut devenir son ennemi. Les personnages, parfaitement campés, profonds et complexes incarnent à merveille un engagement, un instinct de survie qui se dispute parfois à la morale ou lui cède sans vergogne. Que ce soit Lucy ou Angel, ou encore Maria, l’immigrée texane qui se bat au jour le jour pour survivre, chacun a ses motivations, son histoire… Mais aucun n’est tout noir ou tout blanc, et c’est aussi ce qui apporte sa richesse au roman.
Malgré toute sa noirceur et sa violence, j’ai trouvé Water knife moins désespéré que La fille automate. Les sentiments des protagonistes sont exacerbés par une situation qui les dépasse, mais il y a encore de l’humanité dans ces lignes. J’ai été complètement emportée par ce récit qui nous invite à nous remettre en question… avant qu’il ne soit trop tard.
C’est la fin du monde, pensa Angel tandis que d’autres missiles fonçaient sur le complexe. C’est la putain de fin du monde.
Puis, sur les talons de cette pensée, une autre surgit, spontanée. J’imagine que ça fait de moi le diable.
Roman publié aux éditions J’ai lu – Traduit de l’anglais par Sara Doke
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