Résumé : La femme qu’emporte la rivière Crooked flotte entre deux eaux. Sur la rive, deux fillettes qui jouent dans l’après-midi ensoleillé. Elles sont les premières à découvrir le corps et, soudain, leurs jeux cessent. Leur enfance bascule dans la dureté du monde des adultes. La veille, leur père les a laissées seules suffisamment longtemps pour qu’elles puissent le croire coupable de meurtre. Pour ne pas le perdre, comme elles ont perdu leur mère quelques semaines auparavant, elles décident de mentir sur son emploi du temps… et resserrent bien malgré elles les mailles du soupçon autour de lui, le livrant en pâture à une petite ville dont les préjugés et les rancunes lui laissent peu de chances…
Avis : Pour entrer directement dans la polémique, je trouve que Celles de la rivière, présenté dans la catégorie Roman des éditions Mosaïc, est bien plus un thriller qu’un récit d’initiation des deux principales protagonistes, Sam et Ollie. Même si ce livre est aussi le récit de l’abandon d’une part de leur enfance, c’est surtout le suspense haletant qui l’emporte pour moi. Le fait de voir des êtres morts sous forme de lumières ou de lire Alice au pays des merveilles et le fait que ces jeunes filles gardent un fond de rêves, sont un bon lien avec cette transition, ce début de fin de l’enfance. Mais cette touche de fantastique et cette toile de fond, a mon avis, servent le thriller plus que ne sont véritablement l’histoire en soi.
L’alternance des 2 voix – et je mesure toute l’ironie de mon utilisation de ce mot alors que l’un des personnages refuse de parler – donne du rythme et permet une foule de rebondissements. Je dirai même que cela permet parfois de nous égarer vers d’autres pistes, d’autres suspects, voire dans mon cas de me faire envisager une véritable conspiration !
Les rouages politiques et les mécanismes sociétaux dans nos petites villes sont amenés par touches successives et vraiment subtiles. Le rejet de toute différence y est central. Les différences de mœurs – vie dans la nature vs consumérisme – mais aussi différences dans notre approche de la mort. Cette petite fille mutique qui dérange tout le monde démontre notre malaise face au décès et surtout, face a la prise en charge de la douleur et la tristesse liée a la mort.
Avec une pureté d’écriture et une facilité de lecture peu commune, Valerie Geary n’en fait pas des tonnes avec du sang, du gore. Nul besoin et pourtant tout est minutieusement imaginé puis raconté. Les images mentales qui me sont venues en lisant les descriptions de cette rivière Crooked, personnage à elle seule, ou de la prairie où les filles vivent avec leur père, sont tellement fortes que l’on sent l’herbe sous nos pieds et que l’on s’enivre de l’odeur du miel.
Le traitement de l’amour enfin, est superbe. Amour filial, amour naissant, amour toujours, amour folie, tout est traité avec justesse, beauté et parfois démesure quand cela est nécessaire.
Même si la fin est ouverte (mais pas tant que ça !), ce que normalement je n’apprécie pas, elle sonne juste et clôture magnifiquement ce beau roman…. heu, triller ???
Roman paru aux éditions Mosaïc – Traduit par Maryline Beury