Résumé : 1208. Le pape Innocent III, en conflit avec le roi Jean, prononce un interdit sur tout le royaume d’Angleterre. Les églises et les cimetières sont fermés, le haut clergé quitte le pays, les prêtres ont défense de célébrer les offices ou de conférer les sacrements – ni confession, ni mariage, ni extrême-onction. S’ensuit un véritable chaos spirituel dans le royaume, en particulier chez les plus démunis, ceux pour qui la foi est le seul recours. C’est dans ce contexte particulièrement difficile qu’une jeune paysanne, Elena, est appelée au service du seigneur de Gastmere, dans le comté de Norfolk. Là, on l’oblige à s’adonner à un étrange rituel, celui des « mangeurs de péchés », consistant, en l’absence d’extrême-onction, à prendre sur sa conscience tous les péchés non expiés d’un mourant. Cette cérémonie va être le début d’une véritable descente aux enfers pour la jeune fille qui se retrouve bientôt accusée de meurtre. Son cauchemar ne fait que commencer…
Avis : L’univers de Karen Maitland, c’est le Moyen Âge et elle le connaît sur le bout des doigts. Après La compagnie des menteurs et Les âges sombres, nous voilà de retour en Angleterre, pour assister à l’accomplissement d’une quête de vengeance qui aura duré 2 générations.
La malédiction de Norfolk débute en 1160, avec l’injuste exécution de la guérisseuse Gunilda, et la malédiction qu’elle lance, de son dernier souffle, sur la descendance de celui qui l’a condamnée. 50 ans plus tard, la jeune et naïve Elena, serve sur le domaine de Gastemere, sera l’instrument de son châtiment.
Comme à chacun de ses romans, Karen Maitland nous plonge avec brio dans une époque empreinte de mysticisme, où les croyances religieuses tiennent une place prépondérante. Alors que le conflit entre le roi Jean et le pape Innocent III a laissé le peuple sans le réconfort et le ressources de l’Église, il sera prêt à tout pour retrouver la protection promise, quitte à se tourner vers les superstitions païennes. Mais la parole des hommes peut-elle les protéger lorsque le mal est dans leur cœur ? Ce n’est apparemment pas ce que pense la cynique mandragore, narratrice de ce funeste récit.
Le contexte historique est comme toujours très bien retracé ; avec pour cœur les mœurs et les conditions de vies des différentes populations, celle de serf étant ici particulièrement mise en avant.
L’auteure entretient le mystère sur la personne visée par la malédiction et ce n’est que dans les dernières pages qu’elle nous est révélée, ce qui accentue le suspense. Mais si le complot pour assouvir la vengeance des personnages était diabolique à souhait, j’ai eu du mal à comprendre la cible qui nous est finalement présentée. Il me semble que ce n’est pas la bonne, car elle est loin d’être celle qui paie le plus cher tribut.
« Survivre ma belle, il n’y a rien d’autre à faire, endurer et survivre, et si tu y parviens, alors le temps t’accordera ta vengeance. »
Roman publié aux éditions Sonatine – Traduit par Claude et Jean Demanuelli