Planète à louer / Yoss

Planète à louer / Yoss

Quatrième de couverture : Dans un futur indéterminé, une guerre nucléaire totale est sur le point d’éclater. Afin de sauver la Terre, des espèces extraterrestres en prennent possession, après avoir fait montre de leur force en annihilant l’Afrique. Ils y imposent des règles draconiennes visant à rétablir l’équilibre écologique. Un siècle plus tard, notre planète est redevenue un paradis, un « monde souvenir », où les riches xénoïdes viennent faire du tourisme. Mais derrière l’image d’Épinal, les conditions de vie des Terriens sont loin d’être idylliques.
Buca, la prostituée, Moy, l’artiste métis ou Alex, le scientifique de génie, tous n’aspirent qu’à une seule chose : fuir… partir… s’exiler… quitter la Terre… par tous les moyens !

Avis : Ce livre pourrait se résumer en un mot : ironie. L’ironie mordante, amère d’un peuple qui n’a pas su jouer ses cartes, ou qui, peut-être, avait dès le départ une mauvaise main. Sans doute, le jeu était-il même truqué. Quoi qu’il en soit, il se retrouve aujourd’hui dans le rôle d’esclave de nations plus « évoluées ». La race humaine est la grande perdante au loto de l’univers.

La Terre est désormais dominée par les xénoïdes. Plus forts, plus développés technologiquement, ils imposent leur système à une planète où, si le patrimoine est restauré, la population doit se battre pour survivre. Une planète qui vivote dorénavant grâce à un seul modèle économique : le tourisme. Et cette coalition d’extra-terrestres représente le touriste ultime, leur plaisir et leur satisfaction passent avant tout. Pour l’homme, la vie est devenue un combat de tous les instants.

Ce roman a une forme originale, puisqu’il s’agit en fait d’un recueil, mais dont les nouvelles sont interdépendantes les unes des autres. Reliées par la théorie des six degrés de séparation, de la première à la dernière, elles forment une boucle, tout en offrant un panorama saisissant d’une Terre qui se désagrège. Prostitution, pauvreté, corruption, sous-emploi… Chaque nouvelle présente un point de vue différent, et dans lesquelles tous les protagonistes ont une place distincte dans la société : travailleuse sociale, artiste reconnu, sportif professionnel, policier, scientifique de génie, orpheline. En quelques pages, Yoss a su décrire des personnages forts, profonds, tourmentés et en même temps animés d’un espoir infini en des lendemains qui, s’ils ne chantent pas, soient plus doux. Grâce à eux, la description de ce monde désenchanté est alors parfaitement réussie et c’est une tristesse infinie qui s’en dégage.

Deux des nouvelles m’ont plus particulièrement marquée. La première, Le spectacle de la mort, est également celle qui m’a paru la plus violente. Elle démontre bien jusqu’où l’homme est capable d’aller, ce qu’il est prêt à endurer pour un avenir meilleur, pour l’espoir d’un jour acquérir sa liberté. La seconde, La carte Platine, est la plus lumineuse. Porteuse d’espoir, elle est justement placée à la fin de l’ouvrage, ce qui permet de terminer sur une note un peu plus gaie.

Mais Planète à louer est également une allégorie revendiquée par l’auteur, du Cuba des années 90. Ce thème devient d’ailleurs particulièrement clair et frappant, dans les remerciements qu’il fait à la fin de l’ouvrage. Ils font écho aux nouvelles et permettent de mieux comprendre en quoi elles l’illustrent.

Un livre fort, qui traite de sujets graves mais sans pathos, et traité d’une façon originale. À découvrir absolument ! 

« Pour l’honneur ? Quel honneur nous reste-t-il, à nous autres, humains ? Que reste-t-il, sinon la survie à tout prix d’une race vaincue et humiliée sur tous les fronts ? »

Roman publié aux éditions Mnémos (Dédales) – Traduit par Sylvie Miller 

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