1851, Monterey, Californie. L’Ouest, le vrai. Prématurément veuve – délivrée d’un mari qu’elle a suivi sans passion depuis son Michigan natal -, la jeune Eliza devient prostituée dans une maison bien tenue, sous l’égide d’une patronne soucieuse du bien-être de ses « filles », la très sage Mrs Parks. C’est le temps de l’indépendance, des amitiés confraternelles, de la découverte de soi et de la littérature. Mais voilà qu’une série de meurtres viennent faucher de jeunes consoeurs. Face à l’indifférence des autorités, et inspirée par les aventures du détective Dupin, d’Edgar Allan Poe, Eliza décide de mener l’enquête.
Avis : Un métier dangereux est ce que j’appellerais un « cosy western ». Nous sommes en 1851, la ruée vers l’or bas son plein et la jeune Eliza qui n’avait rien demandé d’autre que se perdre dans les yeux de son bel Irlandais, se retrouve mariée avant d’avoir eu le temps de le voir venir à un rustre violent par une famille rigoriste. Heureusement pour elle, la vie dans l’Ouest où il l’a emmenée se charge de rétablir cette injustice, et la voilà débarrassée de cet encombrant mari. Ne voulant pas retourner dans le giron de sa famille, Eliza accepte une place dans une maison close respectable de la ville.
Eh oui, j’ai dit respectable. Parce que ce qu’il y a de remarquable dans le roman de Jane Smiley c’est que les prostituées n’y sont pas traitées comme une sous-population ; les bonnes gens de Monterey ne changent pas de trottoir quand ils croisent ces dames, et personne ne les toisent avec mépris. Il n’y a aucune vulgarité associée à l’établissement de Mme Parks, l’établissement où Eliza travaille. La matrone n’accepte d’ailleurs que les clients polis et propre sur eux et les travailleuses lisent ou brodent sagement en attendant leurs clients. Et ce n’est bien que cela : un travail comme un autre, qui permet avant tout à ces femmes l’indépendance et un bon salaire, si difficiles à acquérir autrement dans ce monde d’hommes.
Alors, lorsque plusieurs femmes de sa « condition » sont retrouvées assassinées, ça sort Eliza de sa bulle de tranquillité. Face à l’indifférence des autorités, elle décide, aidée par une de ses amies, de mener sa propre enquête. Et c’est là que le bât blesse un peu : parce qu’avec Un métier dangereux, on est vraiment dans du cosy-cosy. L’enquête d’Eliza consiste surtout à se demander si toutes les personnes qu’elle croise auraient pu le faire, et à réfléchir aux enquêtes d’Auguste Dupin, l’enquêteur créé par Edgar Allan Poe. Le final et la révélation de la vérité, m’ont paru assez tirés par les cheveux et beaucoup trop facile.
Néanmoins Jane Smiley a construit un roman agréable à lire, qui propose une peinture de la société de l’époque qui sort des sentiers battus tout en parvenant à en respecter les codes. N’y allez pas pour le côté policier qui lui, risque fort de vous décevoir.
Un métier dangereux de Jane Smiley est un roman publié aux éditions Rivages – Traduit de l’anglais (États-Unis) par Carine Chichereau