Gisèle est vétérinaire de campagne, Franck s’est voulu écrivain. Il est désormais père au foyer. Pas de méprise, ce statut est une source intarissable de joie. Car en plus de lui assurer un temps précieux auprès de ses filles, il le dispense de côtoyer ses semblables.
Hormis la fréquentation de quelques soiffards, cyclistes tout-terrain ou misanthropes à mi-temps comme lui, Franck Van Penitas peut se targuer de mener une existence conforme à son tempérament : ritualisée et quasi solitaire. Son potager en est la preuve, où aucun nuisible susceptible d’entraver ce rêve d’autarcie ne survit bien longtemps. Franck traque la météo et transperce à coups de bêche les bestioles aventureuses. Jusqu’à ce jour où une lettre anonyme lui parvient, révélant l’infidélité de sa femme. Face à un événement aussi cataclysmique que banal, n’est pas Van Penitas qui veut. Accablement ? Coup de sang ? Répartition des blâmes ? Très peu pour lui. Franck a beau être un garçon régulier, il n’en est pas moins tout à fait surprenant et modifier son bel équilibre n’entre guère dans ses vues. Son immersion en territoire adultérin, le temps d’un été, prendra l’allure d’un étrange et drolatique roman noir conjugal.
Avis : Sous le compost est un roman qui cache bien son jeu. Il est très agréable à lire, nonobstant ses « nonobstant » justement, au nombre d’au moins un par chapitre ! Il offre un point de vue original, celui d’un père au foyer et dans le même temps, il est noir, adulte et érotique, mais aussi un peu policier sur les bords. Je ne saurai pas le classer, mais une chose est sûre, je l’ai dévoré. En deux jours, il était plié !
Je l’ai trouvé singulier, touchant ET excitant.
Singulier, par le personnage central de Franck. Père au foyer, il gère toute l’intendance de sa petite famille : ses trois filles et sa femme, Gisèle, une belle vétérinaire noire. On vit cette histoire par ses émotions, ses sensations (les paragraphes de description des relations sexuelles sont très multi-sensorielles) et ses points de vue. Il apprend par lettre anonyme que sa femme le trompe et décide (contre toute logique ?) d’entamer une liaison avec la femme de l’amant présumé de la sienne… Pas banal, non ?
Là où Nicolas Maleski est très fort, c’est qu’il distille son humour et ses jugements à l’emporte-pièce mais qu’au fond, il aime tous ses personnages et va les rendre progressivement plus humains, plus attachants et beaucoup moins manichéens, par le truchement de l’histoire.
Franck est coincé dans une sorte d’ennui, même s’il a beaucoup de choses à faire pour tenir sa maison et son jardin, et qu’il remplit le reste de son temps au bar, en vélo ou à donner des coups de mains à droite et gauche. Et il va profiter de cette lettre anonyme pour avoir des relations adultérines. Et là c’est l’explosion d’un érotisme débridé, un poil cynique mais assurément efficace.
Le final bascule dans le polar et là, surprise… J’ai été entrainée par le tourbillon de l’enquête vu de l’intérieur par Franck qui vit lui-même des moments compliqués entre ses différentes « casquettes ». Sa casquette de père : sa fille lui apprend qu’elle est harcelée à l’école ; sa casquette d’amant : ses maitresses s’attachent ou souhaitent se détacher de lui ; sa casquette de citoyen : il est soupçonné ; sa casquette d’être humain : son ami écrivain veut plagier ses écrits…
Bref, je trouve Sous le compost parfait en tout point. Il montre des personnages poignants, des points de vue écolo mais pas dogmatique, et une verve mordante parfois, qui a su me charmer.
Roman publié aux éditions Fleuve
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