Quatrième de couverture : Dans une supérette de quartier, quelques clients font leurs courses, un jour comme tant d’autres. Parmi eux une jeune maman qui a laissé son fils de trois ans seul à la maison devant un dessin animé. Seulement quelques minutes le temps d’acheter ce qui manquait pour son repas. Parmi eux, un couple adultère, parmi eux une vieille dame et son aide familiale, un caissier qui attend de savoir s’il va être papa, une mère en conflit avec son adolescent… Des gens normaux, sans histoire, ou presque. Et puis un junkie qui, à cause du manque, pousse la porte du magasin, armé et cagoulé pour récupérer quelques dizaines d’euros. Mais quand le braquage tourne mal et que, dans un mouvement de panique, les rôles s’inversent, la vie de ces hommes et femmes sans histoire bascule dans l’horreur. Dès lors, entre victimes et bourreaux, la frontière est mince. Si mince…
Avis : Après le remarquable diptyque des « voisins », Derrière la haine et Après la fin, Barbara Abel revient dans un registre complètement différent… et pourtant ! Au cœur de ses romans, des hommes et des femmes ordinaires qui vont voir leurs vies basculer irrémédiablement. Et en cela l’auteure excelle. Elle sait parfaitement mettre l’humain au centre ; nos peurs, nos espoirs, nos désirs cachés, nos fautes inavouées.
Nous sommes vendredi, l’air est doux dans la petite supérette de la rue des Termes. Sauf pour Jo, en manque de sa dose quotidienne et de l’argent qui lui permettrait de l’acheter. Alors il le prendra là où il se trouve. Dans la caisse. Le jeune drogué survolté, en colère contre cette société qui le rejette, le juge, ces personnes bien pensantes, comme celles qui l’entourent… mais encore un gamin lui-même, à peine sorti de l’enfance, prend en otages les 8 personnes se trouvant dans le magasin.
Avant même d’arriver sur les lieux tous les protagonistes sont engagés dans une situation anxiogène et conflictuelle. Chacun a son propre bourreau ou est celui de quelqu’un d’autre. Ces gens sont comme un baril de poudre pour lequel le braqueur va être l’allumette.
Barbara Abel affute encore son style avec L’innocence des bourreaux. Les chapitres sont courts et nerveux. Le phrasé est évocateur, percutant et assène quelques vérités bien senties au passage. Elle aborde avec doigté les problématiques de notre temps – l’égoïsme – comme les intemporelles – les relations familiales. Ici, les bourreaux n’auront jamais été plus innocents, et c’est jusqu’au bout que l’auteure nous le démontre.
Cela n’arrive qu’aux autres… mais aujourd’hui, les autres c’est vous !
« Leur destin a irrémédiablement basculé, elle le sait. Un faux mouvement, un moment d’inadvertance et l’innocence se dérobe brutalement, elle s’enfuit comme un voleur, elle éclate comme une bulle de savon, elle s’effondre comme un château de cartes, dans le bruit mat d’un corps qui s’effondre. »
Roman publié aux éditions Belfond