Chanson douce / Leila Slimani

Chanson douce / Leila Slimani

Couverture de Chanson douce de Leila SlimaniRésumé : Lorsque Myriam, mère de deux jeunes enfants, décide malgré les réticences de son mari de reprendre son activité au sein d’un cabinet d’avocats, le couple se met à la recherche d’une nounou. Après un casting sévère, ils engagent Louise, qui conquiert très vite l’affection des enfants et occupe progressivement une place centrale dans le foyer. Peu à peu le piège de la dépendance mutuelle va se refermer, jusqu’au drame.

Avis : Chanson douce porte bien son titre. Ou comment un livre qui commence par : « Le bébé est mort » vous ensorcelle par sa douce mélopée de mots. Des mots tantôt doux, tantôt acérés.

Le rythme est présent dans le phrasé adapté à chaque personnage, chaque situation. Il est présent dans le changement de point de vue. Les flics, la fille de la nounou Louise, Louise elle-même, Myriam la maman, la voisine, l’amant de Louise, mais c’est toujours en observateur extérieur que Leila Slimani nous dévoile les dessous des choses, le désespoir de Louise ou sa folie, selon l’inclinaison du lecteur.

Ce rythme est loin de nous endormir ; il nous met aux aguets. Il nous montre, de loin d’abord, puis de manière de plus en plus rapprochée (trop ? car cette histoire vous colle à la peau ensuite….), ce paroxysme : comment quelqu’un que l’on paie, qui aime les enfants et qui parait bien sous tous rapports peut-elle faire cela ? C’est aussi dans ce questionnement qu’est le malaise, car à vrai dire la véritable question n’est-elle pas « Qui peut ôter la vie » ?

La vision de la femme de Leila Slimani, et même des femmes en général, m’a touchée. Cet asservissement au boulot pour Myriam, aux hommes pour Louise, et aux enfants pour toutes, même de loin comme Stéphanie la fille de Louise, m’apparaît comme véritable et trop souvent véridique. Sa vision des hommes est entraperçue, ce n’est pas le sujet.

La justesse des images convoquées par l’auteure (surtout celle du malaise ressenti par Stéphanie lors de vacances chez les autres employeurs de sa mère Louise, ou encore la rencontre de l’ancien ami de fac de Myriam, alors que celle-ci est devenue une maman aux cheveux sales et sans rien à dire) pourraient n’être qu’un cliché de plus, mais non cela tombe juste, vrai à point nommé. Et indique le vrai problème, la faille narcissique et/ou filiale.

Tout est orchestré, le fait que Myriam soit maghrébine, que Louise soit une poupée de porcelaine si fragile mais si forte. Ce ne sont que des mines d’or en plus, de la poésie des mots pour aller là où ça fait mal. Là où nos clichés et croyances sont remis le plus en causes et totalement explosés, en laissant le malaise violent que l’on sait. Tuer des enfants dont on a la charge, y a-t-il pire?

Chanson douce est une véritable cocotte-minute avec les dissensions sociales, le rapport à l’enfant, les différentes dépendances : des enfants à la nounou, de la nounou à ses employeurs, des employeurs à la nounou irremplaçable, c’est un crescendo étouffant !!!!

Alors même que l’on connait la fin depuis cette première phrase apocalyptique et dérangeante, on se plait à en imaginer d’autres.

À lire et relire, mais seulement si vous ne souhaitez pas trouver un mode de garde pour vos enfants…

Roman publié aux éditions Gallimard.

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